La SONEMIC, la principale société minière du pays, a été privatisée dans une opacité totale. Les principaux actionnaires sont au nombre de trois : le président de la République, Mahamat Idriss Deby, actionnaire majoritaire avec 70 %, le directeur général de la société, le Général Beguera, et Hisseini Idriss Deby, frère cadet de Mahamat Kaka, qui se partagent les 30 % restants. Exploitant les mines d’or des provinces du Tibesti et du Batha, la SONEMIC exporte chaque année des centaines de kilos d’or vers les marchés du Moyen-Orient, notamment à Dubaï, sans aucune déclaration au Trésor public. Ce détournement des ressources nationales s’opère tandis que la SONEMIC conserve son statut de société publique, régie par le Code minier, délivrant des permis d’exploitation, des licences, et opérant avec une force armée de 400 hommes. En parallèle, les transactions non déclarées se multiplient : des centaines de kilos d’or sont expédiés aux Émirats arabes unis par de discrets vols en jet privé , tandis que des millions de dollars, en espèces, affluent vers des comptes privés.
Selon des informations recueillies par TchadOne, actuellement en Afrique du Sud, le Général Beguera chercherait activement des partenaires pour s’accaparer les ressources minières de Miski, la seule grande mine d’or qui échappe encore au pouvoir.
Dans un État de droit, une telle privatisation sauvage aurait déclenché un scandale politique majeur. Le Conseil National de Transition aurait ouvert une enquête et la société civile aurait massivement protesté. Cependant, au Tchad, l’indifférence générale et la léthargie institutionnelle permettent au pouvoir de démanteler les entreprises publiques en toute impunité. Le ministère du Pétrole, des Mines et de la Géologie, ainsi que celui des Finances, sont réduits au silence. Le secteur minier échappe totalement au contrôle de l’appareil de l’Etat. Le Général Beguera, au cœur de ce système, ne répond à aucune autorité. La SONEMIC, qui prélève 30 % de taxes sur les revenus des pauvres orpailleurs, possède en parallèlement ses propres exploitations et détient le monopole de l’achat d’or, génère des milliards de francs CFA chaque mois, sans qu’aucune taxe ne soit versée au Trésor public. Un cadre du ministère confie à TchadOne que la ministre Alixe Naimbaye a récemment dénoncé l’opacité de la gestion de la SONEMIC, exigeant des explications de la part du Général Beguera. Sa démarche lui a valu un rappel à l’ordre direct du président, la forçant à renoncer à toute velléité de recherche de la vérité.
Après le pillage des ressources pétrolières de Doba pendant deux décennies, c’est désormais le secteur minier qui est pris en otage par le régime, sous le regard passif de l’opinion publique et des corps constitués. Pendant ce temps, la population fait face à une crise économique et sociale sans précédent : les citoyens souffrent de la faim, les services publics sont à l’agonie, et les salaires, lorsqu’ils sont versés, arrivent avec des retards considérables.
La privatisation et le démantèlement systématique des entreprises publiques par le régime tchadien illustrent une dérive oligarchique où les ressources nationales sont accaparées par une poignée de privilégiés, au détriment de l’ensemble de la population. Ces pratiques affaiblissent non seulement les institutions étatiques, mais compromettent aussi l’avenir économique du pays. En privant l’État de ses principales sources de revenus, le régime creuse les inégalités et exacerbe la misère sociale, rendant toute perspective de développement durable illusoire.
Correspondance particulière TchadOne à Ndjamena
Charfadine Beguera, directeur de SONAMIC
Hisseini Idriss Deby, petit frère du président