Des témoignages alarmants parvenus depuis la frontière sud du Tchad indiquent que les troupes de l’armée privée des Itno se déploient le long des 1000 km de la frontière avec la République centrafricaine, équipées d’armes lourdes et prêtes à envahir le pays voisin. Des témoins ont également signalé la présence de l’armée française acheminant ses blindés vers la frontière centrafricaine, suggérant une collaboration avec les troupes itno dans leur préparation à la guerre.
Le régime en place au Tchad semble préparer minutieusement la guerre au sud en cas de résultats défavorables lors du référendum qu’il envisage de tenir. Cependant, des doutes subsistent quant à la volonté réelle de ces généraux de permettre un scrutin libre et transparent pour les sudistes. En effet, il semblerait que leur stratégie consiste plutôt à rendre la zone méridionale invivable en laissant des hommes armés semer la mort, afin de rendre impossible l’organisation du scrutin.
Cette politique de la terre brûlée n’est pas nouvelle dans la région, puisqu’elle a été utilisée avec succès lors de la conférence nationale souveraine de 1993 pour décourager les opposants. Depuis lors, elle a été mise en œuvre jusqu’à l’élection présidentielle de 1996, et semble se poursuivre aujourd’hui.
Cependant, ce qui est nouveau dans cette stratégie, c’est l’entrée en jeu de l’armée française. Le corps expéditionnaire français, qui a été chassé du Mali et du Burkina Faso, a été déployé dans le sud du Tchad. Il est difficile de comprendre pourquoi les troupes françaises sont déployées dans cette région, alors que les menaces se situent plutôt aux frontières avec la Libye et le Soudan. Il est donc légitime de s’interroger sur la véritable raison de ce déploiement de force, qui pourrait être de déstabiliser la République centrafricaine à partir du sud du Tchad.
En tout cas, il est à craindre que la pression grandissante sur la junte militaire au pouvoir au Tchad, en raison des massacres dans le sud et du référendum qui ne présage rien de bon pour Mahamat Kaka Deby Itno et sa clique, ne pousse les caciques à crier haro sur les fédéralistes sudistes que la junte militaire soupçonne de vouloir la sécession. Des voix s’élèvent de plus en plus pour appeler à la résistance armée, et des cas de représailles sporadiques font craindre cette éventualité. Pour les généraux en place, ce pourrait être un prétexte idéal pour mettre à feu et à sang la zone méridionale.
Correspondance particulière TchadOne à Ndjamena.