Au cœur de N’Djamena, une institution censée incarner l’intégrité et la transparence de l’État tchadien est aujourd’hui éclaboussée par un scandale d’une ampleur inédite. L’Agence Nationale des Titres Sécurisés (ANATS), autrefois un symbole de la souveraineté administrative du pays, est devenue, sous la direction de Mahamat Oumar Kessou, un marché noir où le passeport tchadien, document hautement sensible, se négocie comme une vulgaire marchandise.
Dernier épisode en date : la présence confirmée de Moubarack Ardol, ancien directeur de la Société Soudanaise de Mines, dans les locaux de l’ANATS. accompagné de cinq autres soudanais, cet homme, qui devrait théoriquement être sous surveillance étroite, aurait « acheté » un passeport tchadien, selon les révélations du journal soudanais Mujo Press. Des images authentifiées par la presse soudanaise confirment cette scène, jetant une lumière crue sur les pratiques mafieuses qui gangrènent cette institution publique.
Il ne s’agit pas là d’un cas isolé. Des centaines de réfugiés soudanais, fuyant leur pays en proie à des conflits, ont mystérieusement obtenu des passeports tchadiens, alors que des citoyens tchadiens, nés et élevés sur cette terre, attendent des mois, voire des années, pour recevoir ce document essentiel. Ce traitement de faveur accordé aux étrangers, au détriment des citoyens tchadiens, soulève des questions cruciales sur l’intégrité des processus administratifs au sein de l’ANATS.
Sous la houlette de Mahamat Oumar Kessou, l’ANATS ne semble plus être une agence étatique impartiale, mais un véritable royaume clanique. Son directeur, dont la gestion est de plus en plus décriée, est accusé de recruter préférentiellement des individus issus d’une seule partie du pays, marginalisant ainsi des milliers de Tchadiens. Le licenciement précipité de Karim Moussa Ali, un fonctionnaire jusqu’ici respecté pour son intégrité, est interprété comme une tentative désespérée de Kessou pour masquer ses pratiques douteuses.
Ce scandale ne concerne pas uniquement l’ANATS, mais touche au cœur même de la gouvernance au Tchad. Dans un pays où la bureaucratie est déjà perçue comme opaque et corrompue, l’affaire de l’ANATS pourrait bien être la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Des voix s’élèvent désormais pour exiger la destitution immédiate de Mahamat Oumar Kessou et une réforme en profondeur de l’agence. Ces mesures sont indispensables pour restaurer la confiance des citoyens dans une institution qui devrait, avant tout, être au service de l’ensemble des Tchadiens, sans distinction de région, d’ethnie ou de statut social.
Face à ce scandale, une chose est claire : l’ANATS doit redevenir une institution nationale, inclusive, et surtout, intègre. Le temps des passe-droits et des arrangements clandestins doit cesser, pour que la justice et l’égalité reprennent enfin leurs droits au Tchad.
Correspondance particulière Tchadone à N’Djamena